En Chine, trouver un emploi devient très compliqué. Les employeurs se basent sur des critères de recrutement tellement farfelus qu'ils en viennent en mettre en difficulté certains secteurs économiques, faisant bondir les taux de chômage chez les jeunes actifs Chinois. Démotivés, ces derniers sont en outre de moins en moins enclins à se tuer au travail comme leurs aînés. Une révolution silencieuse dans l'Empire du Milieu…

 


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    Chaque entreprise a ses propres critères de recrutement. Mais, en Chine, certaines discriminent des candidats à l'emploi à cause de leur âge, de leur signe astrologique ou d'autres raisons qui n'ont aucun lien avec leurs compétences professionnelles. Un phénomène généralisé et persistant qui inquiète jusqu'aux autorités locales.

    Pour trouver un emploi en Chine, il vaut mieux être jeune (mais pas trop), avoir un nom de famille ne comportant pas certains caractères ou se renseigner sur son groupe sanguingroupe sanguin. Cela peut sembler ubuesque, mais certaines entreprises de l'Empire du Milieu s'appuient sur ces critères de sélection discriminatoires au moment d'embaucher de nouveaux salariés, selon plusieurs médias locaux. 

    L'un d'entre eux, Sixth Tone, s'est entretenu avec une jeune femme de 29 ans à qui des recruteurs ont demandé son signe astrologique alors qu'elle postulait à un poste de comptablecomptable. Sa candidature n'a pas été retenue en raison de l'incompatibilité de son signe avec celui de son potentiel supérieur hiérarchique. « Les signes astrologiques n'ont rien à voir avec les compétences professionnelles. Il est aberrantaberrant que des entreprises aient de telles exigences. Je n'aurais pas accepté cet entretien si j'avais su », a-t-elle confié à Sixth Tone.

      Un peu plus de 20 % des jeunes Chinois de moins de 24 ans sont au chômage, et comble de malchance, au delà de 35 ans, ils sont purement et simplement rejetés des processus de recrutement. © Timeimage, Adobe Stock
      Un peu plus de 20 % des jeunes Chinois de moins de 24 ans sont au chômage, et comble de malchance, au delà de 35 ans, ils sont purement et simplement rejetés des processus de recrutement. © Timeimage, Adobe Stock

    Des taux records de chômage chez les jeunes

    Les témoignages de discriminations à l'embauche se succèdent en Chine, alors que le pays asiatique connaît d'importantes difficultés économiques depuis la fin des restrictions liées à la pandémiepandémie de Covid-19Covid-19. Les jeunes sont les premiers à en pâtir : le taux de chômage des Chinois âgés de 16 à 24 ans a atteint un taux record de 20,8 % en mai (contre 5,2 % pour l'ensemble de la population active), selon des chiffres officiels du Bureau national des statistiques. Des millions de nouveaux diplômés peinent à trouver un travail correspondant à leur niveau d'études, et viennent malheureusement grossir les rangs des demandeurs d'emploi. 

    Ce phénomène est d'autant plus alarmant que le temps joue contre eux. Pour cause, de nombreux employeurs chinois refusent de recruter des salariés qui ont plus de 35 ans. Certaines offres d'emploi le mentionnent même de but en blanc, d'après le New York Times. Cette aversion pour les travailleurs d'âge moyen porteporte un nom dans l'Empire du Milieu : la « malédiction des 35 ans ». Elle atteste de l'inégalité de traitement à laquelle sont confrontés les candidats à l'emploi dans un pays où les biais de discrimination à l'embauche revêtent différentes formes. 

    Des pratiques discriminatoires et déroutantes

    Pourtant, ils sont prohibés par la loi chinoise. Du moins s'ils sont liés à l'origine ethnique, le genre, les croyances religieuses, la situation de handicap ou le lieu d'origine (zone rurale ou urbaine) du candidat. L'âge, le signe astrologique, le nom de famille et les caractéristiques physiques n'en font pas partie, tout comme la plupart des critères de sélection étonnants, pour ne pas dire absurdes, sur lesquels se basent les employeurs du pays lors des processus d'embauche. 

    Les difficultés de recrutement que rencontrent certains secteurs ne parviennent pas à les endiguer, ce qui pousse le gouvernement chinois à tirer la sonnettesonnette d'alarme. Il s'est récemment insurgé contre ces pratiques discriminatoires par le biais du journal China Youth Daily, qu'il contrôle. « Ces critères de recrutement ridicules semblent avoir pour but d'embarrasser les candidats à l'emploi. Ce sont pourtant les entreprises qui risquent de se retrouver dans l'embarras, car ces demandes peu ordinaires peuvent leur valoir des poursuites judiciaires et des sanctions, ce qui nuit grandement à leur image de marque », peut-on y lire.

    Le mouvement Tang Ping (« resté couché ») gagne du terrain. De plus en plus, de jeunes Chinois, entre désillusion et chômage, refusent le travail intensif tel qu'ont pu le connaître leurs aînés. © ryanking999, Adobe Stock
    Le mouvement Tang Ping (« resté couché ») gagne du terrain. De plus en plus, de jeunes Chinois, entre désillusion et chômage, refusent le travail intensif tel qu'ont pu le connaître leurs aînés. © ryanking999, Adobe Stock

    Rébellion silencieuse en mode « Tang ping »  

    De plus, les profils les plus convoités sur le marché du travail risquent de se détourner des entreprises aux processus de recrutement fantaisistes, surtout s'ils sont issus de la jeune génération. En effet, les jeunes Chinois n'entretiennent pas le même lien à l'emploi que leurs aînés. Ils sont rétifs aux heures supplémentaires non rémunérées et refusent de se tuer à la tâche pour des employeurs qui ne partagent pas leurs valeurs. 

    Un changement de mentalités qui déconcerte les recruteurs, et surtout les pouvoirs publics. Ces derniers s'inquiètent tout particulièrement de la mode du tang pingping (« rester couché » en français). Elle consiste à en faire le moins possible au bureau, voire à quitter le monde du travail, par rejet du traditionnel schéma « 996 » -- à savoir travailler de 9 heures à 21 heures, six jours sur sept -- et de la culture consumériste. Pékin prend cette contestation silencieuse très au sérieux puisque le président chinois, Xi Jinping, y a fait allusion durant un discours officiel prononcé en 2021.